Persepolis
est une bande dessinée autobiographique dans laquelle Marjane Satrapi
raconte son passage de
l'enfance à la vie adulte dans un contexte politique difficile, à
partir de la révolution iranienne de 1979-1980. Révolution iranienne qui
sous-entend, pour une petite fille qui devient ensuite
dans ce contexte adolescente, un changement radical dans la manière
de se comporter en tant que femme, dans la culture et les idées que l'on
doit désormais suivre... Ce changement radical va
ensuite s'accompagner d'un exil en Europe qui permet, soit,
d'échapper à la répression iranienne, mais qui rend en même temps
l'adolescence encore plus difficile du fait d'un nouveau
déracinement. En effet, comment réussir à se constuire à ce
moment-clé de la vie alors qu'on ne peut pas se situer, s'identifier à
ce qui nous entoure du fait de déracinements successifs ?
Cette bande-dessinée a de ce fait un double intérêt : elle permet, à la manière de Maus ou de L'art
de voler plus récemment, de revenir de manière détaillée sur un
moment-clé de l'histoire d'un peuple / d'un pays pour mieux le
comprendre, le découvrir. Elle permet aussi, et encore plus que
dans les bandes-dessinées précédentes (puisque Marjane Satrapi
raconte son histoire, elle n'est pas un témoin qui retranscrit
l'histoire de quelqu'un de sa famille, comme Art Spiegelman ou
Antonio Altarriba), de donner à ce moment-clé de l'Histoire un
regard personnel, qui évolue en même temps que la petite fille devient
jeune fille, puis femme. Ce regard personnel qui change nous
fait alors osciller entre indignation, amusement, ou encore
tristesse, ce que ne permet pas un témoignage historique plus
extérieur.
Côté
style graphique, Marjane Satrapi a un trait plutôt minimaliste, avec
des personnages assez grossiers, que
'l'on reconnaît surtout grâce à des détails remarquables (la
moustache du père, la coupe de cheveux de la mère...). Ce qui est
'important, il me semble, dans son dessin, c'est la façon dont sont
utilisés le noir et le blanc pour donner de la vivacité, du réalisme
et en même temps du symbolisme aux planches : il y a en effet une
grande insistance sur l'encrage, qui joue un rôle primordial
dans la représentation d'une société où les femmes sont, après tout,
quasi totalement voilées de noir.
Un exemple qui me semble révélateur de ce jeu sur le noir et le blanc :
Persepolis est en tout cas une bande dessinée riche et passionnante, que j'ai grandement adoré, autant
pour son aspect historique qu'autobiographique. A lire d'urgence !
A
noter que l'adaptation du même nom en film d'animation, sortie en 2007
et réalisée par Marjane Satrapi et
Vincent Paronnaud, est vraiment fidèle à la bande dessinée, autant
narrativement que graphiquement, et est tout aussi passionnante.
Bientôt, un billet sur la bande dessinée Poulet aux prunes et son adaptation
cinématographique du même auteur, que j'ai aussi particulièrement appréciées.
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